Dans un monde où les transformations s’accélèrent, il est grand temps que les salariés prennent leur avenir en main. Encore faut-il leur en donner les moyens.
Par Bernard Roman et Yves Maire du Poset
Le malaise des salariés ne révèle pas seulement une perte de confiance dans leur entreprise et un profond désengagement. Il sonne surtout la fin de leurs illusions quant à leur carrière : un contrat implicite fait de confiance et d’engagement les liait à leur entreprise, contrepartie d’une évolution professionnelle durable. Mais avec les formidables évolutions technologiques et organisationnelles que nous connaissons, ce contrat de confiance est définitivement rompu.
Pour les salariés, le moment est venu, plus que jamais, de prendre leur avenir professionnel en main. Ce qui était jusqu’ici surtout une préoccupation de seniors concerne à présent tout le monde car même les plus jeunes et les plus qualifiés sont, de plus en plus rapidement, frappés d’obsolescence professionnelle.
Investir dans sa carrière
Pour faire face à ce phénomène, que voit-on : des DRH sans solution magique, des dispositifs de formation coûteux et inefficaces, des dispositifs publics et privés d’aide à l’emploi débordés. Confrontées à des changements permanents et de toutes natures, les entreprises ont renoncé à gérer les carrières, même pour les plus jeunes. Les hauts potentiels – de moins en moins nombreux à bénéficier d’une gestion de carrière – n’ont qu’à bien se tenir.
Car, en effet, à quoi bon investir dans les ressources humaines, dans la mobilité et le développement des compétences alors que vous ne savez pas ce que vous réservent les marchés dans trois mois ? Ainsi les entreprises se sont-elles tournées vers le marché de l’emploi pour acquérir les compétences dont elles ont besoin et les lui rendre lorsqu’elles n’en ont plus besoin. En revanche, pour les salariés en surabondance, cela ne marche pas. Alors oui, les réorientations de carrière, changements de métier, créations ou reprises d’entreprise sont des solutions, mais peu y sont réellement préparés.
Parce qu’ils n’ont pas pris le temps d’y réfléchir, de s’y préparer et d’investir ; et parce qu’ils ne sont ni encouragés ni aidés. Pourtant, une carrière mérite qu’on y consacre du temps et de l’argent. Comme rien n’est prévu, chacun se débrouille comme il peut. Aussi, à l’heure où ces questions se posent au coeur des problématiques d’emploi, il est plus que temps d’encourager chacun à investir dans son avenir professionnel !
Sécuriser son avenir professionnel
Les dispositifs d’épargne salariale qui permettent notamment de se constituer une épargne ou de préparer sa retraite doivent intégrer une épargne destinée à préparer et à conduire au mieux ses changements de carrière. Il ne s’agit pas en réalité de remettre en cause ce qui existe, mais plutôt de proposer que les plans d’épargne – PEE et PERCO – soient complétés d’un plan d’épargne carrière – PEC – construisant, avec l’entreprise, le financement nécessaire pour se préparer aux changements de carrière.
Et ceci en utilisant des moyens actuellement mis en oeuvre pour former, adapter, reconvertir ce capital humain accumulé que les ruptures et la volatilité économique envoient souvent à la casse. Ajoutons qu’à défaut d’une initiative publique, le secteur privé pourrait, lui aussi, créer un produit répondant à ce nouveau besoin de gérer sa carrière !
Piloter sa carrière librement
Il y a donc urgence à faire évoluer nos dispositifs pour permettre aux salariés de piloter eux-mêmes leur trajectoire professionnelle. Mais pour cela, encore faut-il en avoir les moyens pécuniaires, au bon moment ; et disposer du temps nécessaire pour pouvoir se préparer comme on l’a décidé, choisir la formation la plus adaptée, le conseil que l’on souhaite, l’accompagnement le plus adapté… Et non subir le recours aux catalogues et aux conseils choisis à votre place par l’entreprise qui espère surtout vous voir la quitter au plus vite...
Redonner de la liberté au salarié tout en le responsabilisant, tel est l’enjeu de ce plan d’épargne carrière. Alors, candidats à l’élection présidentielle, parlementaires, dirigeants d’organismes de prévoyance, assureurs…, nous vous posons une question : qu’attendez-vous pour vous emparer de cette idée ?
Bernard Roman est président d'Agilio Conseil
Yves Maire du Poset est président de Piloter Ma Carrière